L’école régionale puis « Grangeneuve »

LA FORMATION PROFESSIONNELLE en Gruyère au milieu du XXème siècle

Au lieu d’aller à l’école secondaire, les fils d’agriculteurs fréquentaient souvent l’école régionale de Bulle, qu’ils commençaient à 14 ans, jusqu’à leur « émancipation » à l’âge de 16 ans. Cette dernière offrait un programme scolaire condensé et des horaires en accord avec le travail à la ferme. L’année commençait à la mi-octobre et se terminait à la fin mars. Mais les journées des jeunes paysans étaient longues, comme en témoigne ce Bullois né en 1946 :

« Le matin, je me levais vers 5h30 pour aider mon père à traire, puis j’allais « couler » à la Laiterie Moderne, avant de me changer pour me rendre à l’école. Après les cours, c’était à nouveau le travail à la ferme, puis le souper avalé, c’était le moment des devoirs – il y en avait beaucoup ! – qui duraient jusque vers 23 heures. J’aimais bien le lundi soir, parce qu’il y avait la pièce policière à la radio avec « Picoche » ainsi que le samedi soir, pour le « Quart d’heure vaudois » et « Entrez dans la danse ».

Après l’école régionale, certains jeunes paysans continuaient leur formation en suivant pendant encore deux ans les cours de L’Ecole d’agriculture de Grangeneuve, cours dispensés par les professeurs de l’institution fribourgeoise dans le bâtiment bullois ; ce sont eux qui se déplaçaient. Les années 1960 ont été celles de la modernisation de l’agriculture et les jeunes élèves étaient aux premières loges pour voir arriver les transformations :

« Ce qui arrivait de nouveau, c’étaient les engrais. On apprenait à faire l’analyse des sols et à déterminer quels engrais il fallait utiliser. A la stupéfaction des anciens. Un de mes voisins, me voyant faire, m’avait crié : « Tu sèmes du sable ou quoi ? » On allait aussi visiter des fermes-modèles, plus mécanisées où l’on voyait une rationalisation du travail. Certains de ces paysans commençaient à faire de l’ensilage et pouvaient ainsi commencer à faner déjà au mois de mai. C’est dans les années 60 que se sont développées les zones d’ensilage pour le lait livré à l’industrie, et celles de non ensilage pour la fabrication du gruyère. »

Dans ces années-là, la ville de Bulle comptait une trentaine de paysans ; ils ne seront plus que sept quarante ans plus tard...